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Materialien zu Leben und Lehre von Frithjof Schuon

Eschatologie universelle

par

Frithjof Schuon

Chapitre 7 de Sur les traces de la Religion Pérenne

© World Wisdom, Inc.


L’eschatologie fait partie de la cosmologie, et celle-ci prolonge la métaphysique, laquelle s’identifie essentiellement avec la sophia perennis. On peut se demander de quel droit l’eschatologie peut faire partie de cette sophia, étant donné que, épistémologiquement parlant, la pure intellection ne semble pas révéler nos destins d’outre-tombe, alors qu’elle nous révèle les principes universels ; mais en réalité, la connaissance de ces destins est accessible grâce à la connaissance des principes, ou grâce à leur juste application. C’est en effet en comprenant la nature profonde de la subjectivité, et non pas exclusivement par cette voie extérieure qu’est la Révélation [1] , que nous pouvons connaître l’immortalité de l’âme, car, qui dit subjectivité totale ou centrale — et non partielle et périphérique comme celle des animaux — dit par-là même capacité d’objectivité, intuition d’Absolu et immortalité [2] . Et dire que nous sommes immortels, signifie que nous avons existé avant notre naissance humaine — car ce qui n’a pas de fin ne saurait avoir un commencement —, et au surplus, que nous sommes soumis à des cycles ; la vie est un cycle, et notre existence antérieure devait, elle aussi, être un cycle dans une chaîne de cycles. Notre existence postérieure aussi peut procéder par cycles, c’est-à-dire qu’elle y est condamnée si nous n’avons pas pu réaliser la raison d’être de l’état humain qui, étant central, permet précisément d’échapper à la « ronde des existences ».

La condition humaine est, en effet, la porte vers le Paradis : vers le Centre cosmique, qui tout en faisant partie de l’Univers manifesté, se situe néanmoins — grâce à la proximité magnétique du Soleil divin — au-delà de la rotation des mondes et des destins, et par là-même au-delà de la « transmigration ». Et c’est pour cela que « la naissance humaine est difficile à atteindre », selon un texte hindou ; il suffit, pour s’en convaincre, de considérer l’incommensurabilité entre le point central et les innombrables points de la périphérie.

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Il est des âmes qui, pleinement ou suffisamment conformes à la vocation humaine, entrent tout droit au Paradis : ce sont soit les saints, soit les sanctifiés. Dans le premier cas, ce sont les grandes âmes illuminées par le Soleil divin et dispensatrices de rayons bienfaisants ; dans le second cas, ce sont les âmes qui, n’ayant ni défauts de caractère ni tendances mondaines, sont libres — ou libérées — de péchés mortels, et sanctifiées par l’action surnaturelle des moyens de grâce dont elles ont fait leur viatique. Entre les saints et les sanctifiés il y a sans doute des possibilités intermédiaires, mais Dieu seul est juge de leur position et de leur rang.

Toutefois, parmi les sanctifiés — les sauvés par sanctification à la fois naturelle et surnaturelle [3]  —, il en est qui ne sont pas assez parfaits pour pouvoir entrer tout droit au Paradis ; ils attendront donc leur maturité en un lieu que des théologiens ont appelé une « prison honorable », mais qui, de l’avis des Amidistes, est plus que cela puisque, disent-ils, ce lieu se situe au Paradis même ; ils le comparent à un bouton de lotus doré, lequel s’ouvre quand l’âme est mûre. Cet état correspond au « limbe des pères » (limbus = « bord »)de la doctrine catholique : les justes de l'« Ancienne Alliance », selon cette perspective très particulière, s’y trouvaient avant la « descente aux enfers » du Christ-Sauveur [4]  ; conception avant tout symbolique, et fort simplificatrice ; mais parfaitement adéquate quant au principe, et même littéralement vraie dans des cas que nous n’avons pas à définir ici, étant donné la complexité du problème.

Après le « lotus » nous devons envisager le « purgatoire » proprement dit : l’âme, fidèle à sa vocation humaine, c’est-à-dire sincère et persévérante dans ses devoirs moraux et spirituels, ne peut tomber en enfer, mais elle peut passer, avant d’accéder au Paradis, par cet état intermédiaire et douloureux que la doctrine catholique appelle le « purgatoire » : elle doit y passer si elle a des défauts de caractère, ou si elle a des tendances mondaines, ou si elle s’est chargée d’un péché qu’elle n’a pas pu compenser par son attitude morale et spirituelle ni par la grâce d’un moyen sacramentel. Selon la doctrine islamique, le « purgatoire » est un séjour passager en enfer : Dieu sauve du feu « qui Il veut », c’est-à-dire qu’Il est seul juge des impondérables de notre nature ; ou autrement dit, Il est seul à savoir quelle est notre possibilité foncière ou notre substance. S’il y a des confessions chrétiennes qui nient le purgatoire, c’est au fond pour la même raison : parce que les âmes de ceux qui ne sont pas damnés, et qui ipso facto sont destinés à la salvation, sont entre les mains de Dieu et ne concernent que Lui.

Pour ce qui est du Paradis, il faut rendre compte ici de ses régions « horizontales » aussi bien que de ses degrés « verticaux » : les premiers correspondent à des secteurs circulaires, et les seconds, à des cercles concentriques. Les premiers séparent les divers mondes religieux ou confessionnels, et les seconds, les divers degrés dans chacun de ces mondes : d’une part, le Brahmâ-Loka des Hindous par exemple, qui est un lieu de salvation comme le Ciel des Chrétiens, ne coïncide pourtant pas avec ce dernier [5]  ; et d’autre part, dans un même Paradis, le lieu de Béatitude des saints modestes ou des « sanctifiés » n’est pas le même que celui des grands saints. « Il y a beaucoup de demeures dans la maison de mon Père » [6] , sans qu’il y ait pour autant des cloisons étanches entre les divers degrés, car la « communion des saints » fait partie de la Béatitude [7]  ; et il n’y a pas davantage lieu d’admettre qu’il n’y ait aucune communication possible entre les divers secteurs religieux, sur le plan ésotérique où elle peut avoir un sens [8] .

Avant d’aller plus loin, et en ce qui concerne l’eschatologie en général, nous voudrions faire la remarque suivante : on a souvent fait valoir que ni le Confucianisme ni le Shintoïsme n’admettent expressément les idées d’Au-delà et d’immortalité, ce qui ne signifie rien puisqu’ils ont le culte des ancêtres ; s’il n’y avait pas de survie, ce culte n’aurait aucun sens, et il n’y aurait aucun motif pour un empereur du Japon d’aller informer solennellement les âmes des empereurs défunts de tel ou tel événement. On sait du reste que l’une des caractéristiques des traditions de type chamaniste est la parcimonie — non l’absence totale — des informations eschatologiques.

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Il nous faut rendre compte maintenant, d’une part de la possibilité infernale, laquelle maintient l’âme dans l’état humain, et d’autre part des possibilités de « transmigration », lesquelles au contraire l’en font sortir. A rigoureusement parler, l’enfer aussi est en fin de compte une phase de la transmigration, mais avant de libérer l’âme vers d’autres phases ou d’autres états, il l’emprisonne « perpétuellement », mais non « éternellement » ; l’éternité n’appartient qu’à Dieu seul, et d’une certaine manière au Paradis en vertu d’un mystère de participation à l’Immutabilité divine. L’enfer cristallise une chute verticale ; il est « invincible » parce qu’il dure jusqu’à l’épuisement d’un certain cycle dont Dieu seul connaît l’étendue. Entrent en enfer, non ceux qui ont péché accidentellement, avec leur « écorce » pour ainsi dire, mais ceux qui ont péché substantiellement ou avec leur « noyau », et c’est là une distinction qui peut ne pas être perceptible du dehors; ce sont, en tout cas, les orgueilleux, les méchants, les hypocrites, donc tous ceux qui sont le contraire des saints et des sanctifiés.

Exotériquement parlant, l’homme est damné parce qu’il n’accepte pas telle Révélation, telle Vérité, et n’obéit pas à telle loi ; ésotériquement, il se damne lui-même parce qu’il n’accepte pas sa propre Nature fondamentale et primordiale, laquelle lui dicte telle connaissance et tel comportement [9] . La Révélation n’est que la manifestation objective et symbolique de la Lumière que l’homme porte en lui-même, au fond de son être ; elle ne fait que lui rappeler ce qu’il est, et ce qu’il devrait être puisqu’il a oublié ce qu’il est. Si toutes les âmes humaines, avant leur création, doivent attester que Dieu est leur Seigneur — suivant le Coran [10]  — c’est parce qu’elles savent « préexistentiellement » ce qu’est la Norme ; exister c’est, pour la créature humaine, savoir « viscéralement » ce qu’est l’Etre, la Vérité et la Loi ; le péché foncier est un suicide de l’âme.

Il nous reste à parler d’une autre possibilité de survie, à savoir la « transmigration » [11] laquelle reste totalement en dehors de la « sphère d’intérêt » du Monothéisme sémitique, lequel est une sorte de « nationalisme de la condition humaine » et pour cette raison n’envisage que ce qui concerne l’être humain en tant que tel. En dehors de l’état humain, et sans parler des anges et des démons, [12] il n’y a pour cette perspective qu’une sorte de néant ; être exclu de la condition humaine équivaut, pour le Monothéisme, à la damnation. Il y a pourtant, entre cette façon de voir et celle des transmigrationnistes — Hindous et Bouddhistes notamment — un point de jonction, et c’est la notion catholique du « limbe des enfants » où sont censés séjourner, sans souffrir, les enfants morts sans baptême ; or ce lieu, ou cette condition, n’est autre que la transmigration, en d’autres mondes que le nôtre et par conséquent à travers des états non humains, inférieurs ou supérieurs, suivant les cas [13] . « Car large est la porte et spacieuse la route qui conduit à la perdition, et nombreux sont ceux qui s’y engagent » : comme, d’une part, le Christ ne peut pas vouloir dire que la plupart des hommes vont en enfer, et comme, d’autre part, la « perdition » en langage monothéiste et sémitique signifie aussi la sortie de l’état humain, on doit conclure que la parole citée concerne en fait la masse des tièdes et des mondains, qui ignorent l’amour de Dieu — y compris ceux des incroyants qui bénéficient de circonstances atténuantes —, et qui méritent sinon l’enfer, du moins l’expulsion de cet état privilégié qu’est l’homme ; privilégié parce que donnant immédiatement accès à l’Immortalité paradisiaque. Du reste, les « paganismes » n’offraient l’accès aux Champs Elysées ou aux Iles des Bienheureux qu’aux seuls initiés aux Mystères, non à la masse des profanes ; et le cas des religions « transmigrationnistes » est plus ou moins similaire. Le fait que la transmigration à partir de l’état humain débute presque toujours par une sorte de purgatoire, renforce évidemment l’image d’une « perdition », c’est-à-dire d’une disgrâce définitive au point de vue humain.

Le baptême des nouveau-nés a pour but — hormis sa finalité intrinsèque — de les sauver de cette disgrâce, et il a de facto pour effet de les maintenir, en cas de décès, dans l’état humain qui, dans leur cas, sera un état paradisiaque, si bien que le résultat pratique — visé par le « nationalisme de l’état humain » — coïncide avec la finalité que vise le sacrement pour les adultes ; et c’est avec la même motivation que les Musulmans prononcent dans l’oreille des nouveau-nés le Témoignage de Foi, ce qui, du reste, évoque tout le mystère de la puissance sacramentelle du Mantra. L’intention est inverse dans le cas très particulier de la transmigration volontaire des bodhisattvas, laquelle ne passe que par des états « centraux », donc analogues à l’état humain ; car le bodhisattvane désire pas se maintenir dans la « prison dorée » du Paradis humain, mais il entend au contraire pouvoir rayonner dans des mondes non humains jusqu’à la fin du grand cycle cosmique. Il s’agit là d’une possibilité que la perspective monothéiste exclut et qui est même caractéristique pour le Bouddhisme Mahâyâna, sans pour autant s’imposer à tous les Mahayanistes, fussent-ils des saints ; les Amidistes notamment n’aspirent qu’au Paradis d’Amitâbha, lequel équivaut pratiquement au Brahmâ-Loka hindou et au Paradis des religions monothéistes, et lequel est considéré, non comme une « impasse céleste », si l’on peut dire, mais bien au contraire comme une virtualité du Nirvâna.

Nous ne pouvons passer sous silence ici un autre aspect du problème des destins d’outre-tombe ; c’est le suivant : la théologie — islamique aussi bien que chrétienne — enseigne que les animaux sont compris dans la « résurrection de la chair » [14]  : mais, tandis que les hommes sont envoyés soit au Paradis soit en enfer, les animaux seront réduits à l’état de poussière, car ils sont censés n’avoir pas d'« âme immortelle » ; cette opinion se fonde sur le fait que l’Intellect ne se trouve pas actualisé chez les animaux, d’où l’absence de la faculté rationnelle et du langage. En réalité, la situation infra-humaine des animaux ne saurait signifier qu’ils n’ont pas de subjectivité soumise à la loi du karmaet engagée dans la « roue des naissances et des morts » [15]  ; cela concerne aussi, non telle plante isolée sans doute, mais les espèces végétales, dont chacune correspond à une individualité, sans que l’on puisse discerner quelles sont les limites de l’espèce et quels groupes en constituent simplement des modes.

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Nous avons distingué cinq issues posthumes de la vie humaine terrestre : le Paradis, le limbe-lotus, le purgatoire, le limbe-transmigration, l’enfer. Les trois premières issues maintiennent l’état humain ; la quatrième en fait sortir ; la cinquième le maintient pour finalement en faire sortir. Le Paradis et le lotus sont au-delà de la souffrance ; le purgatoire et l’enfer sont des états de souffrance à divers degrés ; la transmigration n’est pas forcément souffrante dans le cas des bodhisattvas, mais elle est mêlée de plaisir et de douleur dans les autres cas. Ou encore : il y a deux attentes du Paradis, une douce et une rigoureuse, à savoir le lotus et le purgatoire ; et il y a deux exclusions hors du Paradis, également une douce et une rigoureuse, à savoir la transmigration et l’enfer ; dans ces deux cas, il y a perte de la condition humaine, soit tout de suite dans le cas de la transmigration, soit en fin de compte dans celui de l’enfer. Quant au Paradis, il est le sommet bienheureux de l’état d’homme, et il n’a pas de contraire symétrique à proprement parler, en dépit des schématisations simplificatrices à intention morale [16]  ; car l’Absolu dont relève « par adoption » le Monde céleste, n’a pas d’opposé, sauf en apparence.

L’éternité n’appartient qu’à Dieu seul, avons-nous dit ; mais nous avons aussi évoqué, par allusion, le fait que ce qu’on appelle « éternité » dans le cas de l’enfer ne saurait coïncider avec ce qu’on peut appeler ainsi dans le cas du Paradis, car il n’y a pas de symétrie entre ces deux ordres, l’un se nourrissant de l’illusion cosmique et l’autre de la Proximité divine. La pérennité paradisiaque n’en est pas moins relative, et par la force des choses ; elle l’est en ce sens qu’elle débouche sur l’Apocatastase, par laquelle tous les phénomènes positifs retournent à leurs Archétypes in Divinis ; en quoi il ne saurait y avoir aucune perte ni aucune privation, d’abord parce que Dieu ne tient jamais moins qu’Il ne promet ou qu’Il ne promet jamais plus qu’Il ne tient, et ensuite — ou plutôt avant tout — à cause de la Plénitude divine, laquelle ne saurait manquer de rien.

Envisagé sous ce rapport, le Paradis est réellement éternel [17]  ; la fin du monde « manifesté » et « extra-principiel » n’est une cessation qu’au point de vue des limitations manifestantes, mais non à celui de la Réalité intrinsèque et totale, laquelle, au contraire, permet aux êtres de redevenir « infiniment » ce qu’ils sont dans leurs Archétypes et dans leur Essence une.

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Toutes nos précédentes considérations pourraient paraître arbitraires et imaginatives au plus haut degré à qui s’en tient à cette immense simplification qu’est la perspective scientiste, mais elles deviennent au contraire plausibles quand, d’une part on reconnaît l’autorité des diverses données traditionnelles, — et nous n’avons pas à revenir ici sur le bien-fondé de cette autorité, lequel coïncide avec la nature même de ce phénomène « naturellement surnaturel » qu’est la Tradition sous toutes ses formes, — et que, d’autre part, on sait tirer de la subjectivité humaine toutes les conséquences proches et lointaines qu’elle implique. C’est précisément cette subjectivité — mystère éblouissant d’évidence — que les philosophes modernes, y compris les plus prétentieux des psychologues, n’ont jamais saisie ni voulu saisir, et il n’y a là rien d’étonnant puisqu’elle offre la clef pour les vérités métaphysiques aussi bien que pour les expériences mystiques, les unes comme les autres exigeant tout ce que nous sommes.

« Connais-toi toi-même », disait l’inscription du temple de Delphes [18]  ; c’est aussi ce qu’exprime ce hadîth : « Qui connaît son âme, connaît son Seigneur » ; et de même le Véda : « Tu es Cela » ; à savoir Atmâ, le Soi à la fois transcendant et immanent, lequel se projette en des myriades de subjectivités relatives ; soumises, elles, à des cycles aussi bien qu’à des localisations, et s’étendant de la moindre fleur jusqu’à cette Manifestation divine directe qu’est l’Avatâra.




NOTES

[1]  Bien que celle-ci constitue toujours la cause occasionnelle, ou la condition initiale, de l’intellection correspondante.

[2]  Comme nous l’avons démontré en d’autres occasions, surtout dans notre livre Du Divin à l’humain, chapitre « Conséquences découlant du mystère de la subjectivité ».

[3]  Ceci n’est pas une contradiction, car la nature spécifique de l’homme comporte par définition des éléments disponibles de surnaturalité.

[4]  C’est dans ce lieu que Dante place de facto — àtout bien considérer — les sages et les héros de l’Antiquité, bien qu’il les associe à l’Inferno, pour des raisons de théologie puisqu’ils furent « païens ».

[5]  Ceux des Paradis hindous dont on est expulsé après épuisement du « bon karma » sont des lieux, non de salvation mais de récompense passagère ; des lieux « périphériques » et non « centraux », et situés en dehors de l’état humain puisqu’ils relèvent de la transmigration.

[6]  Cette parole comporte également, et implicitement, une référence ésotérique aux secteurs célestes des diverses religions.

[7]  Et spécifions que, s’il y a dans les Paradis des degrés, il y a aussi des rythmes, ce que le Coran exprime en disant que les bienheureux auront leur nourriture « matin et soir ». Il n’y a, du reste, pas de monde sans niveaux hiérarchiques ni cycles, c’est-à-dire sans « espace » ni « temps ».

[8]  Cette possibilité de communication interreligieuse a évidemment un sens aussi quand un même personnage à la fois historique et céleste apparaît dans des religions différentes, comme c’est le cas des Prophètes bibliques ; bien que leurs fonctions soient alors différentes suivant la religion où ils se manifestent.

[9]  « Dieu ne fait pas tort aux hommes, mais les hommes se font tort à eux-mêmes. » (Coran, Sourate Yûnus, 44.)

[10]  « Et quand ton Seigneur tira une descendance des reins des fils d’Adam, et qu’Il leur fit témoigner contre eux-mêmes : Ne suis-Je pas votre Seigneur ? — Ils dirent : Oui, nous en témoignons. — (Et cela) afin que vous ne disiez pas, au Jour de la Résurrection : Nous avons été inconscients de cela. — Ou que vous ne disiez : Nos ancêtres ont donné autrefois des associés (à Dieu) ; (or) nous sommes leurs descendants… » (Sourate Les Elévations, 172 et 173) — Ces créatures pré-existentielles sont les possibilités individuelles contenues nécessairement dans la Toute-Possibilité, et appelées à l’Existence — non produites par une Volonté morale — par le Rayonnement existenciant.

[11]  A ne pas confondre avec la métempsychose, où des éléments psychiques en principe périssables d’un mort se greffent sur l’âme d’un vivant, ce qui peut donner l’illusion d’une « réincarnation ». Le phénomène est bénéfique ou maléfique, suivant qu’il s’agit d’un psychisme bon ou mauvais ; d’un saint ou d’un pécheur.

[12]  L’Islam admet également les djinn, les « esprits », tels les génies des éléments — gnomes, ondins, sylphes, salamandres, — et aussi d’autres créatures immatérielles, attachées parfois à des montagnes, des cavernes, des arbres, parfois à des sanctuaires ; intervenant dans la magie blanche ou noire, c’est-à-dire soit dans le chamanisme thérapeutique, soit dans la sorcellerie.

[13]  Soit « périphériques », soit « centraux » : analogues à l’état des animaux dans le premier cas, et à celui des hommes dans le second ; le fait qu’il y a quelque chose d’absolu dans l’état humain — comme il y a quelque chose d’absolu dans le point géométrique — exclut d’ailleurs l’hypothèse évolutionniste et transformiste. Comme les créatures terrestres, les anges sont, eux aussi, soit « périphériques » soit « centraux » : soit qu’ils personnifient telle Qualité divine, qui leur confère à la fois telle perfection et telle limitation, soit qu’ils reflètent l’Etre divin lui-même, et alors ils ne font qu’un au fond : c’est l'« Esprit de Dieu », le Logos céleste, qui se polarise en Archanges et qui inspire les Prophètes.

[14]  La mort corporelle et la séparation subséquente du corps et de l’âme sont la conséquence de la chute du premier couple humain ; situation provisoire qui sera réparée à la fin de ce cycle cosmique, sauf pour quelques êtres privilégiés — tels Hénoc, Elie, le Christ, la Vierge, — qui sont montés au Ciel avec leur corps, alors « transfiguré ».

[15]  Dans le Soufisme, on admet « inofficiellement » que tel animal particulièrement béni ait pu suivre son maître au Paradis, rempli qu’il était d’une barakahde force majeure ; ce qui, tout compte fait, n’a rien d’invraisemblable. Quant à la question de savoir s’il y a des animaux au Ciel, nous ne saurions le nier, et cela parce que le monde animal, comme le monde végétal qui constitue le « Jardin » (Jannah) céleste, fait partie de l’ambiance humaine naturelle ; mais les animaux paradisiaques, pas plus que les plantes du « Jardin », n’ont pas à venir du monde terrestre. Selon les théologiens musulmans, les plantes et les animaux du Ciel ont été créés sur place et pour les élus, ce qui revient à dire qu’ils sont de substance quasi angélique ; « et Dieu est plus savant ».

[16]  Le « vis-à-vis » cosmique inverse du Paradis est non l’enfer seulement mais aussi la transmigration, ce qui illustre la transcendance et l’indépendance du premier. Ajoutons qu’il est des ahâdîth qui attestent la disparition — ou la vacuité finale — de l’enfer ; « il y poussera du cresson », aurait dit le Prophète, et aussi, que Dieu pardonnera au dernier des pécheurs.

[17]  Ce qu’indique d’ailleurs, en Soufisme, l’expression de « Jardin de l’Essence », Jannât edh-Dhât ; lequel transcende divinement les « Jardins des Qualités », Jannât eç-Çifât.

[18]  Formulée par Thalès, puis commentée par Socrate.




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